Tucker Sno-Cat: Les camions des neiges

Les camions des neiges

sno-cat cadre

E.M. Tucker était né en 1892 dans un pays de neige: l'Oregon. ChenillesConfronté toute sa jeunesse à la difficulté de circuler dans la neige poudreuse il s'intéressa très tôt à développer des machines capables de s'affranchir de ces difficultés. Après quelques prototypes peu concluants, sur neigeil finit par mettre au point un engin remarquable qui s'imposa notamment lors de campagnes d'exploration des pôles. Le succès conduisit rapidement à créer une gamme de ces engins avec notamment différentes versions de carrosserie : plateau de transport ou cabine fermée pour loger six à dix personnes voir davantage. Le succès de ces engins est notamment imputable au fait que la conception à été menée dans le bon sens, c'est à dire en partant de la pression que peut supporter la neige fraîche. Si la chenille est clairement le seul moyen d'atteindre de faibles pressions, on était encore dans les années 40 avec des matériaux et des conceptions de chenilles à patins, tout en acier. Ceci hypothéquait déjà fortement tout projet en terme de poids utile. La grande originalité des Sno-Cat réside donc dans la conception de leurs chenilles légères. Chaque chenille est un boîtier en inox, vide, qui se comporte comme un ski. Ce boîtier comporte sur son pourtour, sur chacune de ses faces, une sorte de rail destiné à recevoir les petits roulements à billes de la chenille. Celle-ci est constituée de barreaux d'acier, pour la traction uniquement : plus besoin de lourds patins puisque c'est le boîtier creux qui répartit le poids. Pour le reste, Tucker n'étant pas un motoriste, la machine était construite avec un V8 Chrysler et des ponts Dodge. D'autres originalités caractérisent cet engin. Les deux chenilles avant, comme les deux chenilles arrière, sont solidaires d'une couronne qui les met en rotation par rapport au châssis de l'engin, un peu comme une grue sur un camion. L'engin se conduit donc avec un volant et non un palonnier. Au lieu de tourner par saccades comme le fait un chenillé classique, la trajectoire est adoucie, pour le plus grand confort des passagers. Par ailleurs, les chenilles sont mues par un barbotin situé en partie supérieure et qui est aussi un axe autour duquel elles peuvent osciller. Alors qu'un chenillé classique franchissant une butte bascule brutalement une fois la crête franchie, le Sno-Cat passe l'obstacle beaucoup plus en souplesse. Ce concept a été inventé en 1951. Sa consécration est venue lorsque quatre Sno-Cat participèrent avec succès à la première traversée motorisée de l'Antartic entre novembre 1957 et mars 1958. Douze hommes de la British Commonwealth Trans-Antartic Expedition parcourent ainsi plus de 3000km dans des conditions extrêmes. Des Weasel M29 Studebaker et des tracteurs Muskeg Bombardier faisaient aussi partie de l'expédition. "Ces photos (copyright Trans-Antartic Expedition) montrent les conditions de progression souvent difficiles et dangereuses avec des crevasses qui s'ouvraient parfois sous les véhicules. On a du mal à croire en voyant la deuxième photo que l'engin s'en est sorti, seul ! Avec finesse, doigté et patience l'engin a fini par émerger du trou que l'équipe avait sécurisé en jetant un pont de fortune sous les chenilles. Ce concept s'est révélé si affûté qu'il n'a guère évolué jusqu'à nos jours, tout au plus la ligne générale des engins est-elle devenue un peu plus « carrée » pour leur donner une touche de modernisme. Ils ont juste perdu un peu de leur charme, digne d'une aventure de Tintin. La firme Tucker existe toujours, toujours située dans l'Oregon. Les nouveaux matériaux ont aussi permis des évolutions dans la conception des chenilles (ci-dessus, modèle des années 1950 en orange et modèle en rouge au catalogue 2014).sno-cat profil

Pierre Phliponeau